Oups, j'avais presque oublié
...
Lorsqu’ils entendirent ce soudain vocifèrement, les voleurs se tournèrent comme un seul homme vers sa source. Ils furent stupéfaits de voir foncer sur eux un immense guerrier suivit d’un singulier petit personnage étreignant un épais grimoire contre sa poitrine.
Les deux brigands survivant de l’attaque de la diligence, reconnaissant soudain l’ennemi, se mirent à pousser de grands cris de frayeur en le pointant du doigt. La panique s’empara alors de la bande de malfrats.
En un instant, Terreur fut sur eux et d’un revers de sa lame il tua net le premier d’entre eux.
Désespérés et dans l’impossibilité de se replier, les autres bandits se ruèrent sur lui dans l’espoir de le submerger sous le nombre des attaques. Mais même le surnombre ne semblait pouvoir calmer l’ardeur combattive de ce guerrier d’exception qui paraît chacune de leurs attaques avec une facilité déconcertante. Herbert n’avait pas une folle envie de combattre tous ces brigands à la fois et son esprit pragmatique se dit que le guerrier n’avait visiblement pas besoin d’aide. Il se tint donc sagement à l’écart de la mêlée et se contenta d’observer le combat.
De son côté Lars Amadeus, qui n’avait rien manqué de la scène qui se déroulait dans la clairière, se dit que le moment était venu de dire adieu à la captivité. L’arrivée inopportune de ce dangereux guerrier lui offrait l’occasion parfaite pour quitter discrètement le campement. Il rangea soigneusement son luth dans sa sacoche, empoigna fermement la dague que lui avait donné Helga puis poussa la porte de sa cage de bois.
Alors que les hurlements de rage et d’agonie des combattants résonnaient dans tout le campement, Lars se faufila discrètement au milieu des tentes vers le bosquet le plus proche. Plus que quelques mètres et il serait bientôt hors de danger, courant vers la liberté sous la relative sécurité des arbres…
Mais soudain il s’immobilisa : il venait d’apercevoir à une dizaine mètres de lui l’un des membres de la bande en train de fouiller dans un grand sac pour en sortir une lourde arbalète qu’il braqua un direction de l’imposant guerrier toujours en train de ferrailler avec les autres voleurs.
Le tireur hurla alors à l’attention de ses compères :
« Ecartez-vous les gars !!! »
Comprenant la signification de se soudain signal, tous les bandits en contact avec le guerrier s’écartèrent vivement pour laisser une ligne de mire dégagé à leur camarade. Terreur étouffa un juron entre ses dents lorsqu’il aperçu l’arbalète pointée sur lui :
« Encore !!! », s’exclama-t-il avec dépit.
Quelque chose en Lars le poussa à agir. Il se dit que cela pourrait être une bonne affaire de sauver la vie d’un aussi redoutable guerrier.
Rapide comme l’éclair il lança sa dague vers le tireur en train d’ajuster son tir. La lame mortelle vint toucher le voleur en pleine gorge, lui arrachant un cri de douleur étouffé qui se mua en un gargouillement d’agonie. Le bandit s’écroula alors au sol sans même avoir eu l’occasion de tirer.
A cette vue, Terreur poussa un grondement de joie féroce puis il reporta son regard vers les bandits restant qui avaient assistés, déconfits, à la mort de leur unique chance de vaincre le guerrier. Ils se mirent à pousser des cri de jeunes pucelles éffrayées lorsqu’il virent ce dernier brandire bien haut son énorme lame avec un rugissement de rage jubilatoire.
Comprenant que tout était perdu, les malfrats tournèrent les talons et s’enfuirent à travers les bois. Terreur les poursuivit sur quelques mètres puis s’arrêta aux abords de la clairière, brandissant le poing et noyant les fuyards sous un flots d’insultes fleuries, condamnant leur manque flagrant de courage par un florilège de mots châtiés et percutants.
Puis le calme retomba soudain dans la clairière. Les oiseaux en profitèrent pour se remettre à chanter sans être interrompue par des hurlements barbares et des cris de paniques stridents.
Terreur cracha sur le sol devant lui et rangea son épée dans son fourreau dorsal avec un sifflement métallique sec. Puis tout en s’essuyant son front inondé de sueur, il se retourna vers la clairière ou s’avançaient les deux hommes qui venaient de lui sauver la vie dans la même journée.
Herbert poussa un profond soupir de soulagement comme s’il avait retenu sa respiration tout ce temps. Il était satisfait que cette terrible histoire se termine enfin, il allait maintenant pouvoir reprendre sa route…
Lars s’avança prudemment vers les deux hommes et les étudia attentivement du regard. Le petit homme ressemblait plus à un érudit qu’a un guerrier, d’ailleurs il n’avait pas prit part au combat. Peut-être un mage se dit-il.
Puis il contempla le massif guerrier avec fascination. Quel puissance ! Quel rage ! Il se dit qu’il pourrait peut-être écrire une chanson avec tout ça, il verrait bien…En attendant, il était urgent d’établir le contact et de faire connaître ses intentions.
« Holà messieurs ! Quel bonne fortune de vous avoir croisé ! Voilà plusieurs jours que j’étais l’otage de ces immondes malfrats et votre arrivé soudaine m’a sauvé à coup sur d’un inéluctable trépas ! »
Le jeune homme lui adressa un léger sourire contrit et le guerrier se dirigea vers lui d’un pas conquérant avec un étrange rictus sur les lèvres :
« Je sais pas ce que veux dire inéluctable mais je sais que toi aussi tu m’as sauvé la vie et cela, je t’en serais éternellement reconnaissant !!! »
Il échangèrent une ferme poignée de main et Lars cru alors qu’il allait y laisser quelques phalanges. Puis Terreur lui administra une grande claque amicale dans le dos qui faillit projeter le barde sur le sol poussiéreux de la clairière.
Lars fit une grimace de douleur qu’il tacha de changer en sourire aimable, puis il lui adressa un timide merci tout en massant son épaule endolorie. Le colossal guerrier se remit à tonitruer :
« Je me présente! Moi c’est Johan Wilhem, dit « la Terreur » mais vous pouvez m’appelez Terreur tout simplement !!! », hurla-t-il à l’attention de Lars et Herbert.
« Et toi mon gars, c’est quoi ton nom ?», demanda au barde qui se tenait devant lui.
« Mon nom est Lars Amadeus : auteur, compositeur, chanteur et musicien de renom ! Vous connaissez sûrement mon plus grand succès, « Les nobles dames du temps jadis ». Lars fut déçu de constater que Terreur le fixait d’un air peu convaincu. Il se tourna vers Herbert mais ce dernier ne semblait pas plus au courant.
Terreur se tourna vivement vers Herbert et pointa un doigts inquisiteur dans sa direction :
« Et toi p’tit gras !?! C’est quoi ton blaze ? »
Il paru hésiter un instant, comme s’il venait subitement d’oublier son nom puis sursauta et se mit à bredouiller :
« Heu…Herbert…Je m’appelle Herbert Hauptmann… »
Terreur fit une moue réprobatrice puis reprit calmement :
« Bon c’est pas grave, je continuerais à t’appeler p’tit gars… »
Herbert fut profondément vexé mais tacha de n’en rien laissé paraître. Il se tourna alors vers ses deux compagnons et risqua une question :
« Et maintenant, que faisons-nous ? »
Terreur esquissa un sourire narquois puis se dirigea d’un pas décidé vers le tas de sacs et de bagages abandonnés par les brigands au cours de leur fuite.
« Bien sur, suis-je bête ! », s’exclama Herbert, «Avec toutes ces émotions j’en avais complètement oublié le but de notre mission ! C’est pauvres gens vont êtres ravis de retrouver leur possessions… »
« Et puis quoi encore !!! », l’interrompit Terreur, « Si ces gens voulaient tant récupérer leurs affaires y z’avaient qu’a se bouger la rondelle !!! »
Il se redressa de toute sa stature, ses bras gigantesques chargés du butin des voleurs. Puis il sourit de toutes ses dents et s’exclama :
« On va garder tout ça ! Ca nous rapportera plus que ce que ces bourgeoises emperlousées auraient bien voulu nous donner ! Tiens voilà ta part !!! »
Il lança une bourse de cuir pleine de pièces d’or à Herbert qui l’a rattrapa par réflexe mais la laissa aussitôt retomber sur le sol, comme si elle avait été trop brûlante pour pouvoir la garder dans ses mains.
Puis il jeta un regard dépité ver Terreur et dit d’une voix tremblante :
« Mais…mais…c’est du vol ! »
Terreur renifla de mépris puis se mit à farfouiller dans les sacs des voyageurs tout en grognant :
« Mais non ! C’est la juste rétribution de notre action d’éclat…Et puis s’y on nous fait des problèmes, on dira que les voleurs se sont enfuient avec le butin ! »
Il s’empara d’une poignée de bijoux qu’il vint fourrer dans les mains tendues de Lars
« Tiens mon gars, voilà ta part ! Il ne sera pas dit que Terreur est un homme ingrat !!! »
Les yeux de Lars se mirent à briller lorsqu’il contempla les colliers de perles, puis il reporta son regard vers le guerrier et se mit à sourire.
Décidément ce garçon lui plaisait…De plus, contrairement à ce qu’il pensait au premier abord, il était loin d’être un brute sanguinaire et sans cervelle. Il disposait même d’un certain sens de l’honneur malgré une morale approximative. Lars se dit qu’il serait bon de voyager avec un allié de cette trempe…
Il fourra les bijoux dans sa besace puis s’adressa à ses improbables complices d’un ton enjoué :
« Dites moi mes amis, j’ai l’intention de me rendre à Altdorf dans l’espoir de trouver un généreux mécène. Que diriez-vous de cheminer en ma compagnie vers la capitale, si toutefois le cœur vous en dit ! »
Terreur le fixa d’un œil torve tout en grattant son menton barbu. Il semblait réfléchir intensément, mais en fait, c’était juste sa barbe qui le grattait. Il se dit alors qu’il serait grand temps de la raser. Puis, émergeant de ses pensées, il se vit à vociférer :
« C’est d’accord mon gars, j’te suis!!! Y’aura bien moyen de trouver du boulot à Altdorf !!! ». Puis il se tourna vers Herbert qui s’était fait tout petit dans son coin en espérant qu’on l’oublierais :
« Tu viens avec nous bien sur !!!Hein p’tit gars !?! »
Herbert fut prit de court par cette soudaine affirmation, ses yeux faillirent sortir de leurs orbites. Venir avec eux !?! Mais pourquoi faire bon sang ?!?
Malheur à lui se dit Herbert, cette brute épaisse s’était prit d’affection pour lui et voulait le garder à ses côtés. Il faillit maudire Sigmar d’avoir croisé la route de ce guerrier puis il se ravisa soudain. Il regarda la bourse qui traînait à ses pieds et entrevit le scintillement des pièces d’or qui en débordaient. Puis il se mit à réfléchir :
Avec cet argent il pourrait louer une chambre confortable dans les quartiers étudiants d’Altdorf plutôt que de loger dans une mansarde crasseuse sous les combles d’un quelconque taudis, le seul type d’habitation actuellement dans ses moyens. Puis il se dit que même s’il partait maintenant et rejoignait la diligence, il ne saurait mentir aux voyageurs qui lui demanderaient où étaient passé leur argent. Il aurait alors condamné Terreur à devenir un Hors-la-loi bon pour la potence, ce que le gaillard ne méritait tout de même pas...
Enfin, il se dit que Frau Albretch et les autres devaient mener un train de vie aisée qui leur permettrait facilement de se passer de l’argent dont ils venaient d’être délesté…
« Très bien ! », répondit-il finalement, « Je vous suivrais jusqu'à Altdorf, mais je dois dire que je ne cautionne pas notre action… »
« On s’en fiche !!! », le coupa Terreur, « L’important c’est qu’avec cet argent, on va pouvoir se faire péter la panse dans la prochaine auberge !!! »
Puis il explosa d’un rire gras et puissant qui résonna dans toute la clairière. Lars se mit à sourire.
« Oui… », se dit-il, « Je crois que j’ai fait une bonne affaire en rencontrant ses deux là. Si je me débrouille bien, ils feront ma fortune… »
Puis il vint poser une main affectueuse sur les épaules de ses nouveaux compagnons et leur adressa un sourire mielleux.
« Alors c’est parfait mes amis ! En avant pour Altdorf ! Je vous régalerais de quelques unes de mes chanson pendant que nous cheminerons ! »
Ils attrapèrent tous une brochette de saucisses grillées laissées à l’abandon par les voleurs puis se mirent en route en mastiquant bruyamment. Juste avant de quitter la clairière, Lars jeta un regard aux alentours puis se rendit compte qu’il avait oublié quelque chose : Helga ! Il scruta la clairière à sa recherche mais ne trouva pas trace d’elle.
« Elle a dut être effrayé par Terreur et aura fuit sans demander son reste. Tant mieux ! », se dit-il.
Puis il tourna les talons et rattrapa ses deux compagnons qui disparaissaient déjà dans les profondeurs de la forêt…